mercredi 21 février 2018

1er avril

On m'appelle au commandant. J'apprends que je pars le lendemain avec ma compagnie qui sera commandée par le lieutenant Roetlinger, une belle brute. Bien entendu silence sur où nous allons. Nous savons simplement que nous allons très près des lignes pour organiser des positions de repli.

Revue de cartouches, de vivres, d'armes, etc.. Le lieutenant Jacquemot, vieux sous-off rempilé, promu officier à la faveur de la guerre, fait des moulinets avec son sabre. Il va en tuer du boche. En fait, il fera des pieds et des mains pour ne jamais monter en ligne et il y parviendra, toujours reversé comme instructeur de bataillons de jeunes.

Le lendemain, les camions sont là. Nous nous y entassons avec tout notre matériel. Notre premier déplacement en camions. Dans un tintamarre épouvantable de bruits de ferraille, de pétarades, le convoi s'ébranle dans une apothéose de fumées, de poussière, et sous les regards admiratifs des deux compagnies qui restent à Coligny.

Enfin, nous allons savoir. Demain, cette bande de terre hachée n'aura plus de secrets pour nous et nous aurons à notre tour le privilège de regarder les gens de l'arrière, ceux qui ne savent pas, avec un souverain mépris.

Image d'illustration -  Site de Coulon 59
 Pour en savoir plus sur les pigeons pendant la 1ère guerre mondiale, rendez-vous sur le site de Coulon 59.

Les camions prennent bientôt la route de Châlons à Sainte-Menehould. De plus en plus, le paysage sent la guerre : camps de concentration de chevaux, dépôts de matériels, troupes au repos, camps de colombophiles ; bref, toute la horde immense que chaque armée entraîne dans son sillage.

La poussière nous a poudrés à frimas. ¨Poussière blanche de craie irrespirable qui vous colle dans la gorge. Nous la connaîtrons d'autres fois.


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