Des cages à poules comme avion
Chaque jour des avions boches se promènent dans le secteur. Ils sont les maîtres incontestés et il faut voir nos vieilles "cages à poules" faire demi-tour dès que, de loin, elles aperçoivent un fridolin. Un jour, un Focker en descend une au-dessus de notre ferme. C'est l'époque des grandes hécatombes.
Image de http://fandavion.free.fr/farmanmf7.htm |
La grande difficulté pour le fridolin doit être de trouver une victime car nos malheureux pilotes n'osent plus se risquer au-dessus des lignes. Sur ces vieux Farman, sans fuselage, le pilote a l'hélice dans le dos. Il suffit donc au boche d'arriver derrière lui pour le descendre à coup sûr. Avec ça, une vitesse qui doit bien approcher de 80 km à l'heure. Pensez si les Fritz ont la partie belle !
En ce printemps de 1916, les as boches ont dû se multiplier, et ce n'était pas difficile.
A cette époque aussi apparaissent les bimoteurs Caudron. Ils nous semblent lourds et peu maniables.
Caudron bimoteur |
D'un seul coup, un fridolin en enflamme deux au-dessus du bois de la Gruerie. Les deux premiers que je vois flamber. C'est impressionnant. Comme à ce temps-là on ignorait les parachutes, du moins dans les avions, pilotes, observateurs ou mitrailleurs n'avaient d'autre alternative que de se laisser griller comme des hannetons, à moins de sauter dans le vide, ce qu'ils préféraient généralement.
Coup de vent tragique sur les saucisses
Derrière nous, les saucisses d'Hans et de Courtémont sont des observateurs silencieux. Elles aussi auront leur coup dur. Ce devait être le 7 mai (*). Un soir où, si je me rappelle bien, les Français devaient tenter un coup de main, il survient une bourrasque épouvantable. Les saucisses tirant sur leurs câbles se couchèrent sous la rafale et ..tac.. en voici une qui vient de casser son câble, puis une seconde, puis une troisième. Nous en comptons 7 qui, libérées, s'envolent, montant, roulant sur elles-même, les petites folles. Les nacelles tournant autour dans un amalgame de câbles, de ficelles. Et elles filent tout droit chez les boches, les malheureuses.
Les aérostiers doivent faire une drôle de bille là dedans. A eux de se cramponner. Et voici que les boches s'amusent à leur tirer dessus alors qu'elles vont tout droit chez eux. Ce n'est pas fair-play.
Ce sera la grande débâcle des saucisses et, ce soir là, une trentaine sur l'ensemble du front rompront leurs amarres.
Image d'illustration. Collection particulière |
Pendant ce temps-là, au-dessus de nous, une cage à poule, surprise par la bourrasque, essaie péniblement de regagner l'arrière. Elle ne peut y parvenir... il y des moments où elle recule. Le pilote a toutefois la chance de pouvoir atterrir près de notre cantonnement. Nous courons amarrer son coucou avec des piquets et des fils de fer. De cette façon, il ne sera pas culbuté par le vent.
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